les FEMEN: l'Ukraine au sein de la discorde.

Un homme donne un coup de pied à une membre des Femen, devant la Grande Mosquée de Paris, le 3 avril 2013

Les FEMEN ont encore frappé. 

Réunies devant la grande Mosquée de Paris, le 3 avril, elles ont brûlé un drapeau noir "salafiste" en soutien à Amina Tyler. Cette jeune Tunisienne qui avait dévoilé son torse nu, marqué du slogan " Fuck you moral"et encore "Mon corps m’appartient et n’est source d’honneur pour personne.", cette fois en arabe
Peu de temps après, le 1er mars, elle fondait le 1er groupe FEMEN tunisien. 
Suite à des menaces de mort, cette jeune lycéenne de 19 ans, est portée disparue depuis le 22 mars. Certains parlent d'une séquestration de sa famille, de camisole chimique, d'autres évoquent le courroux des salafistes. Bref, Amina a fait les frais de sa contestation. 

Seulement voilà, la jeune Amina, dont on ne peut que saluer le courage, a selon moi été victime de l'inconscience du FEMEN. En effet, les photos, envoyées par Amina à l'ONG activiste/féministe/"sextrémiste", ont été relayées par le FEMEN, et diffusées sur leurs réseaux par ce même groupe. Ces femmes ignorent-elles la situation en Tunisie? Ont-elles seulement pensé à avertir Amina du risque qu'elle courait avant de la jeter dans la fosse aux lions? Je ne le sais pas, mais je trouve leur démarche questionable, et ce sur plusieurs points à propos desquels je m'expliquerai plus tard.

A 19 ans, on est jeune et on a peur de rien, ni du cancer, ni de l'autorité, dans son cas on a pas peur de la colère des barbus extrémistes. Et puis Internet, c'est tellement abstrait, on a l'impression que derrière son écran on ne craint rien. Il n'en est rien et pour preuve. 
Je ne tente pas ici d'infantiliser cette jeune femme, qui je le répète a fait preuve d'un courage extrême, je me pose seulement des questions. Et vu la condition de cette lycéenne, que l'on dit shootée aux anti-dépresseurs par sa propre famille (une journaliste de Marianne est partie à sa recherche), il est bon de s'en poser. 

Revenons un peu sur l'origine et les revendications du FEMEN, puisque ce mouvement, est flou pour pas mal de monde (parfois à juste titre) : 

En 2008 trois Ukrainiennes, Anna Hutsol (l'actuelle présidente du groupe) Oksana Chatchko et Alexandra Chevchtchenko, se travestissent en prostituées pour lutter contre le tourisme sexuel dans leur pays. En effet, Le commerce sexuel, alimenté par un fort taux de chômage, a explosé dans le pays depuis 2005, année où l’obligation d’obtenir un visa touristique a disparu. 
Les trois amazones défilent donc sur la place de L'Indépendance à Kiev, affublées de leurs bas résille et talons aiguilles, scandant " L'Ukraine n'est pas un bordel!" 

Le groupe ne tarde pas à se rendre compte que les politiciens ukrainiens ne sont pas les seuls à porter le chapeau et décident de s'en prendre aux touristes sexuels venus de l’étranger: Quand The Rock FM, populaire station de radio néo-zélandaise, organise le concours «Gagne une femme» dans lequel des hommes sont envoyés en Ukraine pour rencontrer de potentielles épouses, les filles de Femen arrivèrent seins nus à l'aéroport pour humilier le gagnant, un certain Greg.

Depuis les Femen multiplient les actions à travers le monde : contre Berlusconi et sa lubricité sans borne, contre la burqa, contre les ANIMA, contre l'Église, contre la situation sanitaire d'un zoo de Kiev et j'en passe. Bref les FEMEN sont sur tous les fronts et on s'y perd un peu...
En réalité, les FEMEN luttent contre toutes les formes de patriarcat : "la dictature, l'église, l'industrie du sexe ..." 

Pour ce qui est de leur mode de revendication, il est non violent (mais pas pacifiste, nuance) et se veut provocateur.
Inna Schevchenko, une des leader du mouvement Femen, et fondatrice du "camp d'entraînement" FEMEN à Paris s'explique sur leur choix du top-less. En effet, pendant les deux premières années d’existence des Femen, raconte Inna, aucun journaliste ou presque n’a fait le déplacement. Jusqu’à ce qu’elles enlèvent le haut en 2010.

« On sait de quoi les médias ont besoin. Du sexe, des scandales, des agressions : il faut leur donner. Être dans les journaux, c’est exister. C’est aussi notre seule protection face aux attaques, pendant les manifs. »

Pourquoi le mouvement FEMEN me dérange? 
(sur la forme et sous le fond)

Je tiens à préciser, pour éviter toute suspicion de prise de parti socio/politico/religieuse:
que je suis athée, mais je respecte les croyances d'autrui, je suis une femme, j'admire ce qu'ont pu faire les féministes pour les droits des femmes et enfin, je ne me positionne ni à droite, ni à gauche, ni même au centre (parce que pour moi c'est un peu la même salade tout ça). 

Donc :

1. Elles militent seins nus (la plupart du temps), c'est même devenu leur marque de fabrique, au point que quand on pense FEMEN on s'imagine plus des paires de seins et c'est dommage pour elles, un peu moins les idées qu'ils y a plus haut (au sens propre comme figuré). Mais c'est un peu de leur faute aussi,  parce que même si j'adore jeter la pierre sur les médias instrumentalisants, il faut reconnaître que parfois, ils ne prennent que ce qu'on leur donne. 
Comme Inna Schevchenko le soulève, la motivation du FEMEN à se mettre seins nus est avant tout liée à une volonté de visibilité. C'est normal de vouloir être visible lorsque l'on milite, mais on peut se demander si le choix des seins nus est tout à fait adéquat. 
Par cet effeuillage, elles ont eu ce qu'elles voulaient : on les voit partout. 
Mais ce que l'on voit avant tout, ce sont leurs boobs et les slogans très courts et souvent assez mal choisis qu'elles brandissent sur leurs poitrines de rêve. 
On peut se demander alors qui du FEMEN ou des médias mène la danse. 

Elles se dénudent pour revendiquer la liberté de leur corps, la pleine féminité, pour faire un pied de nez à une sexualisation et une instrumentalisation de la femme de plus en plus envahissante. 
Elles se dénudent parce que «Les femmes nues sont considérées uniquement comme des objets sexuels, nous donnons une nouvelle signification à la nudité du corps. La nudité des femmes n'est plus synonyme de prostitution ou d'exploitation sexuelle. La nudité signifie désormais que les femmes sont prêtes à se battre.» déclare une des fondatrices du FEMEN, 

Mais faut-il leur rappeler que la nudité n'est pas forcément associée à la pornographie ou à la prostitution? L'art l'a bien montré, les nudistes l'ont bien montré, les hippies avant elles en ont fait de même...

De plus, les seins nus sont peut-être une portée hautement révolutionnaire et contestataire en Ukraine, mais en France, des seins, on en voit partout, de la plage aux panneaux publicitaires, en passant par les films et les magazines. Certes, on voit pas souvent des nanas se balader à poil dans les rues (quoique ...)  , mais bon, c'est pas non plus ouf comme plan. 

En gros, elles se travestissent en objet sexuel pour dénoncer la sexualisation et la normalisation. Mais c'est raté, ce qui nous amène au point numéro 2 :

2. Les FEMEN sont quasiment toutes des bombasses blondes, conformes aux "standards de beauté européens" : 

Du moins celles qui font la une. Vous avez remarqué comme elles sont toutes belles et fraîches , les tétons allègrement pointé vers les cieux, le ventre gainé et la chevelure soyeuse?
J'exagère un peu, mais globalement c'est ça: les femen sont des bonnasses, elles sont blanches, jeunes, belles et rebelles.

Où sont passées les autres militantes? Où sont les nanas avec des vergetures, du bide, les seins meurtris par l'allaitement? Où sont les blacks et les beurettes dans les journaux?

Peut-être qu'ils / qu'elles veulent nous les cacher, je ne sais pas qui est derrière tout ça. Mais je trouve ça un peu triste pour un mouvement qui revendique l'universalité de la femme et sa libération.

3. Les FEMEN revendiquent tellement pour tout et n'importe comment que leur message n'est pas vraiment clair et quand il l'est a du mal à passer:

J'en ai parlé un peu plus tôt et ça a peut-être attiré votre attention. 
dépoitraillées dans Notre-Dame pour lutter contre le pape,  manifestation en soutien de la révolution du Lotus en Egypte, contre Moubarak, et pour l’émancipation des femmes Egyptiennes, croisade contre l'islamisme et la charria...Elles luttent contre Poutine et la suprématie Russe, se revendiquent pur produits de la Révolution Orange Ukrainienne.

Seulement, à Kiev, Inna (encore elle), la jolie blonde, a découpé à la tronçonneuse une croix catholique en soutien aux Pussy Riot. 
Mais voilà, la croix tronçonnée n’avait "rien d'orthodoxe"(je vous rappelle que les pussy Riots ont "manifesté" contre l'orthodoxie) : elle s’avérait être un monument dédié aux victimes du stalinisme. Constituant donc un symbole de résistance face à la Russie. 
Érigée en 2004 par les jeunes militants de la Révolution Orange, cette croix catholique commémorait, au grand damn de Moscou, le souvenir de l’holodomor, cette famine programmée qui fit, durant l’hiver 1932/1933, entre 2,6 et 5 millions de morts.



En gros, elles s'embrouillent un peu les pinceaux à force d'être énervées les minettes. 

Revenons maintenant sur leur action d'hier, devant la Grande Mosquée de Paris, qui laisse perplexe puisqu'amalgame mis à part, on ne voit pas trop ce que le salafisme et le gouvernement tunisien ont à voir avec ce lieu de culte... ET SURTOUT, surtout, ces jeunes étourdies ont tout bonnement brûlé un drapeau symbole de l'islam et non spécifiquement du salafisme. Ces petits malins de salafistes tentent juste de s'approprier ce symbole, sans doute pour mieux se légitimer. Une victoire de plus pour eux donc, grâce au FEMEN qui visiblement met tous les barbus dans le même sac. 

4. Parce que leurs actions relèvent souvent de l'irrespect total alors qu'elles prônent la tolérance. 

En juillet 2011, les FEMEN tentent d’agresser le patriarche orthodoxe Kirill lors d’une visite a Kiev, sous le slogan : Tuez Kirill, la campagne étant accompagnée d’une photo de ce dernier décapité. C'est quand même d'une violence et d'un mauvais goût extrême. 

Lors de leur action contre CIVITAS, Les FEMEN, déguisées en bonne sœurs, ont gazées des poussettes et des enfants avec du faux gaz en hurlant « voila le sperme de dieu »

J'en passe encore mais très franchement, comment des jeunes filles prônant l'égalité et la tolérance peuvent-elles se permettre, non seulement de stigmatiser les croyants (je répète que je suis profondément athée et je ne fais pas référence à leur action contre CIVITAS dans l'immédiat, mais à leurs actions contre les religions en général annoncées plus haut), d'imposer dans une république laïque comme la France, une ligne de conduite? La laïcité n'est pas le déni ou la résistance contre les religions mais une exclusion du pouvoir spirituel dans le pouvoir temporel, reposant sur la liberté des cultes. 

Et qui sont ces femmes, potentiellement mère, qui gazent des familles? aussi réfractaires à la modernité et bigotes soient-elles, des familles qui "militent"pour faire entendre leur voix n'ont pas à se faire agresser de la sorte. Les enfants qui étaient là n'avaient rien demandé ce jour là, ni d'avoir des parents rétrogrades, ni de se faire bousculer dans la foule, mais encore moins de se faire gazer comme des vulgaires mouches (quand bien même le gaz était faux). 

J'ai pris ces exemples, qui ne sont pas forcément les meilleurs (en regard de mon idéologie) , mais cela prouve bien qu'avec un peu de recul, on se rend bien compte que leurs actions versent dans des extrêmes pas vraiment louables, peu importe ce qu'elles revendiquent. 


5. Parce qu'au final elles infantilisent la femme : 


Les FEMEN ont manifesté contre le port du voile, de la burqa, contre la prostitution. Ca pourrait être parfaitement louable, mais seulement ces jeunes filles croient libérer les femmes en leur prêchant la bonne parole, en leur expliquant ce qu'elles doivent être ou ne pas être. Que les femmes musulmanes murées dans le silence sortent de leur carcan, je vote pour. Que les femmes oppressées puissent se libérer, je vote pour aussi. 
Mais franchement, toutes les musulmanes et autres femmes croyantes ne sont pas des pantins instrumentalisés par les hommes: elles choisissent parfois de porter le voile, elles choisissent leur foi. 

En tant qu'abolitionnistes elles refusent toute forme de prostitution, mais qui sont-elles pour vouloir dicter leur opinion à propos du "plus vieux métier du monde"? Il est clair que la prostitution est très souvent liée au trafic humain et à la mafia, mais bordel (passez moi l'expression), pourquoi vouloir dicter aux femmes ce qu'elles doivent faire de leur corps? 
Jusqu'à preuve du contraire, même si j'en conviens ce n'est le cas que d'une minorité de femmes, certaines sont à leur compte, ont choisi ce gagne-pain plutôt qu'un autre. 
Et puis quand on parle de prostitution, faut-il rappeler que les hommes sont aussi concernés? 
Je ne fais pas l'apologie de la prostitution, loin de là, mais je ne pense pas qu'une abolition pure et simple règle le problème.

6. Les nanas qui dénoncent le patriarcat et qui se font (PEUT-ÊTRE) financer leurs frasques par de riches hommes d'affaire des 4 coins du monde ne seraient-elles pas un peu hypocrites? 

Bon j'avoue franchement que l'on peut avoir quelques doutes sur la véracité de l'info, mais selon une journaliste Russe (et qui a priori aurait peut-être pour mission de décrédibiliser le FEMEN) se serait infiltrée dans leur organisation. Elle rapporte des salaires plus que confortables, des frais allègrement financés : sur ce site (qui relaie par ailleurs une info russe), la journaliste témoigne. 

Certains soupçonnent par ailleurs le FEMEN d'être financé par des magnats de l'industrie ou du show biz, notamment le milliardaire allemand Helmut Geier (plus connu sous le nom de DJ HELL) , de la femme d’affaires allemande Beat Schober, et de l’homme d'affaires américain Jed Sunden...

Ceci dit, pour l'instant je n'ai pas trouvé de confirmation sérieuse de l'info.


Enfin bref, que les FEMEN soient sextrémistes ou extrémistes, l'ultracisme est dangereux. Même si ses motivations premières sont louables, l'histoire nous l'a bien prouvée...

Coradote. 


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